Airbnb : responsable de la crise du logement? - moneyradar.org (2024)

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Depuis sa création en 2008, la plateforme de location de logements entre particuliers Airbnb a non seulement révolutionné le secteur du tourisme, mais a également suscité un vif débat sur son impact sur le marché immobilier.

En promettant une expérience authentique et économique pour les voyageurs, Airbnb a séduit des millions d’utilisateurs à travers le globe. Cependant, derrière les récits de voyages enrichissants et de gains attractifs pour les hôtes, se cache une tout autre réalité.

Penchons nous ensemble comment Airbnb, à travers son modèle économique disruptif, a influencé le marché immobilier et touristique, souvent au détriment des aspirants propriétaires.

De la flambée des prix immobiliers à la raréfaction des logements disponible pour les locaux en passant par son effet sur le secteur hôtelier, explorons ensemble les différents impacts du mastodonte Airbnb sur le tourisme mondial.

L’histoire d’une croissance explosive

L’aventure Airbnb débute en 2007, lorsque deux colocataires de San Francisco, Brian Chesky et Joe Gebbia, cherchent un moyen de payer leur loyer. Ils transforment leur appartement en espace d’accueil temporaire pour ceux en quête d’un hébergement nocturne, offrant un matelas gonflable et le petit-déjeuner pour 80 dollars la nuit.

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Ce qui n’était au départ qu’une solution de dépannage se mue rapidement en une idée d’entreprise prometteuse. Rejoints par leur ami Nathan Blecharczyk (grand propriétaire et milliardaire à ses heures perdues), ils lancent le site web «Airbed & Breakfast», précurseur d’Airbnb.

En deux ans, la startup passe de quelques annonces à 500, avec 10.000 utilisateurs et 15 employés. Les fondateurs obtiennent un financement de 7 millions de dollars pour développer une application et étendre leur concept.

2011 marque une étape décisive avec une levée de fonds de 120 millions de dollars, facilitant l’expansion internationale d’Airbnb. L’Europe, avec l’Allemagne et le Royaume-Uni en tête, adopte rapidement cette alternative aux hôtels traditionnels, séduite par une nouvelle manière de voyager et d’exploiter les biens immobiliers.

L’entreprise connaît une croissance fulgurante, levant 20 milliards de dollars en 2015 et élargissant sa présence à 30.000 villes dans 192 pays. Avec des centaines de millions de clients et 1,5 milliard de réservations en 2019, Airbnb s’est transformée : passant d’une simple solution de dépannage en une véritable «machine de guerre» du secteur touristique.

Le saviez-vous ?

Après sa première journée de cotation en bourse, le prix de l’action a bondi de 115%, valorisant la société à 100 milliards de dollars (oui, parle bien de milliards!)

L’effet “Airbnb” sur le marché immobilier

En rendant le court terme locatif plus lucratif et accessible, la plateforme a transformé des quartiers entiers, souvent au détriment des résidents et des aspirants propriétaires. L’une des conséquences les plus palpables a été la flambée des prix de l’immobilier dans de nombreuses villes.

En effet, la conversion de logements résidentiels en locations de courte durée a réduit l’offre disponible pour l’achat ou la location longue durée, poussant ainsi les prix à la hausse. Cette situation est particulièrement critique dans les centres-villes touristiques, où la demande pour des expériences locales authentiques via Airbnb est la plus forte.

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Par ailleurs, l’impact d’Airbnb sur le marché locatif traditionnel est tout aussi significatif. Les propriétaires, attirés par les revenus plus élevés du court terme (150 à 300% comparés aux revenus générés par des locations traditionnelles), délaissent les baux résidentiels classiques.

Cette tendance se traduit par une pénurie de logements disponibles pour les résidents permanents, exacerbant les problèmes d’accessibilité au logement dans plusieurs métropoles. Les communautés locales se retrouvent ainsi confrontées à une érosion de leur tissu social, les logements étant de plus en plus occupés par des visiteurs de passage plutôt que par des habitants à long terme.

La transformation des quartiers sous l’effet Airbnb s’accompagne également de nuisances pour les résidents, telles que le bruit et l’insécurité, contribuant à la dégradation de la qualité de vie.

Face à ces enjeux, des villes du monde entier ont commencé à imposer des régulations strictes, limitant le nombre de jours de location autorisés ou exigeant des enregistrements spécifiques pour les hôtes.

Ces mesures visent à rééquilibrer le marché immobilier et à préserver le caractère résidentiel des quartiers, tout en permettant une exploitation raisonnable et régulée du tourisme via des plateformes comme Airbnb.

Le saviez-vous ?

La plateforme propose près de 400 000 logements en France répartis sur 19 000 communes, et Paris en compte à elle seule plus de 90 000, le plus gros spot mondial de location Airbnb.

L’autre victime collatérale : le secteur hôtelier

En offrant une alternative souvent moins coûteuse et plus authentique aux hôtels, Airbnb a séduit une large part de voyageurs à la recherche d’expériences plus personnalisées et immersives. Cette mutation des préférences des consommateurs a contraint les hôtels à voir diminuer leur fréquentation.

Bien que Airbnb ait contribué à démocratiser le tourisme en rendant les voyages accessibles à un plus grand nombre de personnes, les différences de législations entre la plateforme et les hôteliers n’ont fait que susciter la grogne de ces derniers, et à raison.

La fiscalité dans le cadre des locations Airbnb est bien moins lourde qu’elle ne l’est pour les professionnels du secteur hôtelier, et ce, même si certains hôtes sont identifiés comme professionnels.

Le statut de loueur de meublés touristiques au régime micro bénéficie d’un abattement de 71% pour le calcul de son revenu sur les impôts foncier, un abattement auquel le secteur hôtelier n’a pas droit.

Une concurrence déloyale selon les professionnels du secteur hôtelier, d’autant plus quand on se rend compte qu’aujourd’hui le prix des locations Airbnb arrive quasiment au niveau de celui des hôtels, mais sans le service.

Le saviez-vous ?

En 2019, 50% des hôtes proposaient en moyenne 5 hébergements différents.

Un développement controversé

À travers le monde, des villes ont commencé à légiférer pour encadrer les locations de courte durée, cherchant à limiter les effets négatifs tout en préservant les bénéfices économiques du tourisme.

En France, l‘inscription en mairie est devenue obligatoire, de même que déclarer votre bien au fisc et à l’office du tourisme pour la taxe de séjour en plus d’obtenir un numéro unique, avec des restrictions sur le nombre de nuitées autorisées, 120 par an.

Les contrevenants, ainsi qu’Airbnb en cas de manquement à ses obligations de contrôle, s’exposent à de lourdes amendes : de 25 000 à 50 000 euros.

Cette réglementation vise à éviter la transformation de logements résidentiels en hébergements touristiques permanents, préservant ainsi l’offre de logements pour les Parisiens.

Aux États-Unis, des villes comme New York et San Francisco ont également adopté des mesures strictes. À New York, une loi interdit la location de logements entiers pour moins de 30 jours, une règle visant à préserver les logements pour les résidents permanents.

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San Francisco, berceau d’Airbnb, a mis en place un système d’enregistrement obligatoire pour les hôtes, limitant les locations de courte durée à 90 jours par an lorsque l’hôte n’est pas présent.

Ces défis réglementaires ne se limitent pas aux frontières des États-Unis. Barcelone, confrontée à une pression touristique élevée, a imposé des restrictions sévères sur les nouvelles licences touristiques, dans une tentative de rééquilibrer le marché immobilier local et de réduire l’impact du tourisme de masse.

Le saviez-vous ?

En Italie, c’est 621 millions de dollars d’arriérés d’impôts que la plateforme doit au fisc et côté français, c’est 12,5 millions d’euros que demande la ville de Paris pour non-respect des obligations déclaratives.

La réponse du géant

Face aux pressions mondiales, Airbnb a réagi en maintenant une position initialement inflexible, refusant de partager les données privées de ses clients avec les autorités, en vertu de la protection de la vie privée.

En réponse à ces défis réglementaires croissants et à la menace sur son modèle d’affaires, Airbnb a tenté de naviguer dans le paysage réglementaire en engageant des efforts de lobbying et en faisant appel à l’arbitrage de l’Union européenne, dans l’espoir de trouver un terrain d’entente sur une réglementation commune à la location de biens touristiques.

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Cependant, ces efforts n’ont pas abouti et l’Union Européenne a mis en place un système d’enregistrement unique pour tous les hôtes, obligeant Airbnb à fournir un accès indirect à ses données​​.

En effet, puisque le numéro unique doit obligatoirement figurer sur l’annonce, plus facile pour les autorités européennes de savoir qui gère les annonces et d’identifier les fraudeurs.

Le saviez-vous ?

Depuis octobre 2023, les cofondateurs d’Airbnb, Brian Chesky et Joe Gebbia, ont vendu pour près de 1,5 milliard de dollars de leurs parts. Pas vraiment rassurant.

Une histoire à suivre

Il est indéniable que la plateforme a révolutionné le marché de la location de courte durée, se hissant au rang de géant mondial de l’hébergement touristique. Mais avec les retours négatifs et les impacts de la plateforme sur les secteurs immobilier et touristique, difficile de ne pas voir la fin approchée.

Cependant, la fin d’Airbnb tel que nous le connaissons ne signifie pas la disparition de l’entreprise. Une révolution interne n’est pas à exclure, contrainte par la loi de revenir à ses origines : des offres plus modestes et authentiques, loin du modèle tentaculaire actuel.

Cette évolution entraînerait une réduction de l’offre dans de nombreuses villes et, par conséquent, une diminution des revenus. Airbnb, face à ces défis, ne pourra probablement pas compenser par des hausses de prix sans risquer de perdre du terrain face à ses concurrents.

Malgré tout, en capitalisant sur sa position dominante, sa taille et ses ressources, Airbnb pourrait offrir des avantages inédits, marquant peut-être le début d’une nouvelle ère pour l’entreprise et ses utilisateurs, et potentiellement, le renouveau de ses promesses initiales.

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Author: Carmelo Roob

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